Le Père Noël n'existe pas !
puisque cela intéresse tout le monde, et pas seulement
les plus jeunes (on entend bien dire à propos de gens qui ont passé
l'âge «Celui-là il croit au Père Noël»). Il est
facile de dire que le Père Noël n'existe pas, que le gros barbu
et ses increvables montures sont incapables de livrer la marchandise. Mais
s'est-on jamais donné la peine de démonter pièce par
pièce cette supercherie vieille de cent cinquante ans ? Le mensuel
new-yorkais
Spy l'a fait. Avec une rigueur toute scientifique.
Si vous connaissez un tant soit peu la nature humaine, vous savez
qu'il est fort improbable qu'un homme normal choisisse, sans raison particulière,
de consacrer sa vie à fabriquer des jouets et à les distribuer
aux petits garcons et aux petites filles du monde entier. Mais comme il s'agit
d'une enquête objective, les questions de motivation n'ont pas à
être prises en compte. Nous voulons seulement savoir si un tel homme
pourrait accomplir sa mission.
Commençons par une mauvaise nouvelle. Le traîneau du
Père Noël est soi-disant tiré par des rennes volants.
Après d'intenses recherches, on n'a malheureusement trouvé
aucune espèce de rennes connue à ce jour sachant voler. Mais
il y a encore des raisons d'espérer, si on pense qu'il y a plusieurs millions
espèces d'organismes vivants qui ne sont pas encore classées.
Même si la plupart de ces espèces sont des insectes et des germes,
rien ne permet d'exclure complètement l'existence de rennes volants
que le Père Noël est cependant le seul à avoir vus jusqu'à
présent.
Passons à la charge de travail du Père Noël. Il
y a environ 2 milliards d'enfants dans le monde. On obtient ce nombre en
se limitant aux personnes âgées de moins de 18 ans, puisque c'est
l'âge moyen en apparence raisonnable, mais variable en fait selon les
individus, pour lequel le Père Noël perd toute crédibilité.
Puisque le Père Noël ne s'occupe pas des enfants musulmans, hindous,
juifs et bouddhistes, cela réduit la charge de travail à 15 % du total,
en fait 378 millions selon le bureau de recensement de la population
mondiale. Avec une moyenne de 3,5 enfants par foyer, cela nous donne à
peu près 91,8 millions de foyers. Bien entendu, on suppose aussi qu'il
y a au minimum un enfant sage dans chaque maison (la plupart des enfants recevant des
cadeaux, les standards de sagesse du vieil homme ne sont manifestement pas bien haut).
Le Père Noël a au moins 31 heures de travail pendant la
nuit de Noël, à cause des différents fuseaux horaires
et de la rotation de la terre, et en supposant qu'il voyage d'Est en Ouest
(ce qui parait tout de même logique !). Cela nous amène à
822,6 visites par seconde ; c'est-à-dire que pour chaque foyer chrétien
avec des enfants sages, le Père Noël dispose d'un peu plus d'un millième
de seconde pour se garer, sauter hors du traîneau, dégringoler
par la cheminée, remplir les chaussettes de jouets, placer le reste
des cadeaux sous le sapin, manger les quelques restes du repas qui traînent,
remonter dans la cheminée, remonter dans le traîneau et passer
à la maison suivante. En supposant que chacun de ces 91,8 millions
d'arrêts sont équitablement répartis sur la surface du
globe (ce qui bien entendu est complètement faux comme nous le savons,
mais que nous admettrons comme d'habitude dans l'intérêt de
nos calculs), en le supposant donc, nous en sommes maintenant à une
maison tous les 1,26 kilomètres pour un voyage total de 121 155 200
kilomètres, sans compter les voyages transocéaniques, les arrêts
pour le fourrage des valeureux rennes et pour faire ce que la plupart d'entre
nous doivent faire au moins une fois toutes les 31 heures.
Cela veut dire que le traîneau du Père Noël se déplace
à une vitesse moyenne de 1 040 kilomètres par seconde, soit
3 000 fois la vitesse du son. On est certes encore loin des vitesses relativistes,
mais, à titre de comparaison, le véhicule le plus rapide jamais
fabriqué par l'homme, la sonde spatiale
Ulysse, se déplace
à la vitesse relativement étriquée de 43,8 kilomètres
par seconde, et un renne conventionnel, donc non-volant à priori,
plafonne à 24 kilomètre par heure. Supposons toutefois que
les rennes volants sont capables d'atteindre des vitesses supersoniques grâce,
disons, à l'effet de l'esprit de Noël.
La charge pesant sur le traîneau est un autre élément
intéressant de l'enquête. En supposant que chaque enfant reçoit
en tout et pour tout un jeu de
Legode taille moyenne (poids d'un kilogramme),
le traîneau transporte alors environ 321 000 tonnes, sans parler du
Père Noël qu'on a toujours décrit comme étant ostensiblement
obèse. Sur terre, un renne conventionnel ne peut pas tirer, disons,
plus de 150 kilos. Même en supposant qu'un renne volant (s'il en existe)
puisse tirer 10 fois la charge normale, on n'arrive pas au résultat
avec 8 ou même 9 d'entre eux. Non, il faut en fait 252 000 rennes !
Un renne (anémique) pesant en moyenne 75 kilos, on arrive à
une charge totale de 396 000 tonnes sans compter le traîneau ! Finalement,
396 000 tonnes se déplaçant à 1 040 kilomètres
par seconde provoquent une énorme résistance de l'air. Les rennes
sont en fait élevés à la même température
qu'une navette spatiale rentrant dans l'atmosphère terrestre. Les deux
rennes de tête absorbent une énergie de 14,3.10
30 joules.
En résumé, ils se désintègrent presque
instantanément, exposant les rennes qui les suivent. Les 252 000 rennes
sont donc entièrement pulvérisés en moins de 4,26 millièmes
de seconde. Le Père Noël, entre-temps, est soumis à une
force centrifuge égale à 17 500 fois la gravité terrestre.
Un Père Noël de 150 kilos (poids, répétons-le,
ridiculement sous-estimé) serait cloué au fond de son traîneau
par environ 2 275 tonnes de pression. Cette force le tuera sur le coup, lui
broyant les os, pulvérisant sa chair, le transformant en gelée rose.
Conclusion de l'enquête : si un jour le Père Noël
a vraiment livré des jouets la veille de Noël, il est maintenant
mort depuis longtemps. Désolé pour ceux qui perdent ici leurs
dernières illusions.